Ritz W. Rakotomalala

En quelques questions


Pianiste, compositeur, chef de chœur et d'orchestre, d'origine malgache et également de nationalité britannique, sa spécialité musicale demeure le chant choral. Voici un aperçu de sa personnalité en quelques questions.


Que signifie le "W" qu'on voit toujours dans votre nom ?

Il s'agit de mon deuxième prénom, Weljohn, qu'on m'a donné en mémoire d'un grand oncle décédé alors qu'il n'était qu'enfant. Et j'y tiens !


Quel genre d'homme êtes-vous ?

Je suis le genre d'homme à penser que l'humanité est encore digne de confiance alors même que chaque jour on a des milliers de preuves du contraire. Le genre d'homme qui se lève si quelqu'un est debout dans le métro alors qu'il y a des places assises libres. Le genre d'homme à croire encore que la musique est une arme de pacification massive... Bref, un naïf lucide en quelque sorte.

Quelles sont vos inspirations pour la composition ?

Quelques œuvres de grands compositeurs peuvent être des sources d'inspiration : Francis Poulenc pour son audace, Thierry Machuel pour sa simplicité, John Williams pour son imagination, Bach pour suprême sagesse, Fauré pour son sens mélodique, Schumann pour son côté torturé... un peu tous les "Grands" en définitive mais en sachant qu'on ne les égalera jamais.


Qui est votre compositeur préféré ?

Il m'est impossible de répondre à cette question. Ils sont tous excellents et pourtant si différents. Par exemple, Beethoven est, selon moi, le meilleur symphioniste, mais il n'est pas mon préféré. Mozart est un génie suprême, on sait tous qu'il n'y pas de succès possible sans passer par sa musique. Mais il n'est pas mon préféré. En revanche, Bach est un génie divin, sa musique est composée pour Dieu et pourtant il n'est pas nécessaire d'être croyant pour la comprendre. Par le passé, il y a bien 10 ans, il m'est arrivé de renoncer à collaborer avec des personnes qui n'avaient pas d'affinité avec Bach. Bref... En fait, je crois qu'un "compositeur préféré", ça ne peut pas exister. Je peux passer 3 mois à me gaver de la musique baroque française jusqu'à en être obèse, et les 3 mois suivants à n'écouter que du Wagner et du Berlioz.

Ritz, croyez-vous en Dieu ?

Vous abordez là un sujet infiniment intime. Je ne vous dirai donc que ce que savent déjà ceux qui me connaissent : je suis calviniste (NDLR: protestant). J'imagine assez mal composer ou même interpréter de la musique sacrée de Bach, Haendel, Mendelssohn ou autres, sans avoir ne serait-ce qu'un semblant d'affinité avec Dieu. Ce point de vue reste très personnel et donc évidemment discutable. Mais permettez que je n'en dise pas plus !😊

Quelles sont les plus grandes difficultés dans la composition ?

Il faut être inspiré par d'autres tout en restant fidèle à son identité musicale. Si on compose, c'est qu'on a quelque chose à dire. Cela signifie qu'il faudra accepter que personne ne nous comprenne, ou au contraire, accepter que tout le monde nous complimente. Mais la plus grande difficulté n'est ni la technique ni l'inspiration, c'est plutôt celle d'affronter sa propre paresse et dompter ses propres défauts. Faire le tri dans la foison d'idées qui vous hante et surtout, coucher ce tri sur papier, cela a de quoi décourager.


Avez-vous un meilleur souvenir de scène ?

J'en ai quelques-uns. Je pense par exemple à ces concerts donnés lorsque je faisais partie de ces chœurs de jeunes quand j'avais 20-25 ans. Souvent, dans ce genre d'ensemble, les chanteurs sont unis par des liens d'amitié forts que la musique vient alors sublimer. Et c'est cette émotion un peu naïve que l'on retient et qu'on essaye d'entretenir par la suite.


Mais s'il fallait retenir un meilleur souvenir, c'est sans doute pour Saint-Jean de Damas, une œuvre peu connue de Sergueï Taneiev. L'œuvre était tellement puissante et chargée en émotions que je crois n'avoir encore jamais vécu un tel concert. Elle se termine par des accords légers et lointains chantés a cappella par le choœur, comme la parole irréfutable d'un Dieu qui vous apaise. Quand j'ai lentement baissé les bras, le silence qui s'en est suivi avant les applaudissements a duré peut-être une minute, tant l'âme était saisie. Puis, sont arrivés de longs applaudissements et les regards humides de quelques chanteurs. Voilà un souvenir qui reste longtemps.